Bonjour à tous !
Je voulais revenir avec vous sur une habitude de plus en plus répandue dans les familles et dont le développement inquiète la naturopathe que je suis : les compotes à boire.
Que ce soit au cabinet, en visio ou dans ma vie privée – mes amis qui me servent de cobayes vont finir par ne plus vouloir passer de temps avec moi par peur de se retrouver dans mes posts ! Désolée !! - , je remarque de plus en plus de parents qui proposent des compotes à boire à leurs enfants pour le goûter, voire pour le dessert.
Au demeurant, l’idée paraît intéressante, elle offre la possibilité de faire manger des fruits sans trop de sucres ajoutés aux enfants plutôt que de la pâte à tartiner ou de la confiture, elle permet d’avoir toujours sous la main quelque chose à manger qui ne risque pas de s’écraser au fond du sac, et la majorité des enfants adorent cela ! Un vrai ticket gagnant !
Et bien, en fait, non, pas tant que cela. Si on creuse un peu la question et qu’on y regarde de plus près, on s’aperçoit que les compotes présentent de nombreux inconvénients.
Commençons tout d’abord par ceux qui sont les plus évidents : par rapport à un fruit frais qui a conservé ses vitamines, ses anti-oxydants et ses fibres (surtout s’il est consommé rapidement après cueillette), les compotes de pomme, qu’elles soient à boire ou à manger, voient la majorité de ces nutriments détruits par la cuisson. Il est possible d’envisager des compotes crues en mettant des fruits frais dans un blender, mais elles se conservent très mal et s’oxydent très rapidement. Elles doivent ainsi être consommées immédiatement et on perd alors le côté pratique des compotes à emporter.
Pourquoi est-il intéressant de conserver les fibres intactes ? Et bien essentiellement pour deux raisons : tout d’abord, parce que les fibres vont nourrir les micro-organismes qui constituent notre flore intestinale et permettre à celle-ci de rester en bonne santé. Ensuite, parce qu’elles entraînent une assimilation plus lente des sucres contenus naturellement dans les fruits. Les fibres prennent du temps à digérer. Les sucres vont alors arriver dans le sang de manière étalée dans le temps et vont engendrer une hausse de la glycémie (l’hormone produite par le pancréas pour faire rentrer le sucre dans les cellules) moindre par rapport aux compotes. Les jus, dans lesquels les fibres sont totalement absentes, sont la pire manière de consommer des fruits de ce point de vue.
En outre, les compotes à boire consommées de manière régulière ont tendance à favoriser l’apparition de caries et diminuent les occasions pour les petits de croquer, de mâcher, de mastiquer, ce qui peut également avoir un impact sur la position et la vitalité de leurs dents futures et de leurs mâchoires. Les enfants ont besoin de mâcher pour se développer correctement, ce que nous avons souvent tendance à oublier dans notre société avec la diversification alimentaire sous forme de purée et les plats dits « pour enfants » de type yaourt, compotes, purée, steak haché, poulet élevé en batterie avec une viande très tendre sans fibre musculaire, pâtes… De nombreux dentistes s’élèvent aujourd’hui contre les compotes à boire. Il serait temps de les entendre!
Aparté: mâcher permet également d'envoyer des signaux au tube digestif afin qu'il commence à préparer les sucs nécessaires à l'assimilation des nutriments et de mélanger les aliments à la salive. En buvant sans mâcher, nous sautons ces étapes pourtant très intéressantes.
De plus, les compotes du commerce contiennent très souvent des conservateurs, des exhausteurs de goûts, des arômes artificiels, parfois des édulcorants ou des sucres ajoutés (regardez bien les compositions, pas les slogans marketing) qui influencent négativement le microbiote intestinal et par extension le comportement et la santé de nos enfants. Elles sont également une catastrophe pour le porte-monnaie et l’environnement. Bien plus chères que les compotes classiques et avec des emballages jetables, elles ont tout contre elles. Pour palier cela, de nombreuses familles se tournent vers des emballages réutilisables pour les remplir elles-mêmes de compotes en grands pots, voire fait maison. C’est bien sûr une amélioration, mais le problème de base reste le même. L’emballage est généralement en plastique, ce qui signifie qu’en cas de température élevée, par exemple, des perturbateurs endocriniens vont passer dans les compotes. Il est aussi souvent ludique et sympa, ce qui attire l’enfant et le pousse à manger une quantité plus importante de compote, d’autant plus qu’il ne voit pas ce qu’il mange, contrairement à une purée de fruits présentée dans un bol ou une assiette et consommée à la petite cuillère. Il a donc plus de risque de ne pas ressentir la sensation de satiété pourtant essentielle à une alimentation équilibrée.
Enfin, les occidentaux en général et les enfants en particulier ont tendance à manger actuellement trop de glucides. Les fruits sont des glucides ; s’ils sont présentés en compote, les enfants en mangeront plus car ils ne croquent pas et le sentiment de satiété met plus de temps à arriver à leur cerveau. Même si le goûter est a priori un moment intéressant de la journée pour ingérer ces glucides, habituer ses enfants à en avoir systématiquement à ce repas n’est pas une bonne chose sur le long terme.
Je vous le dis souvent - c'est un peu mon cheval de bataille!-, mais je crois vraiment que notre société, en voulant simplifier à outrance une partie de notre quotidien, nous met en réalité régulièrement des bâtons dans les roues. Nous mettons juste un peu plus de temps à nous en rendre compte, souvent quand il est déjà trop tard.
Alors si vos enfants vous réclament des compotes à boire pour faire comme les copains, accordez-leur ce plaisir de temps en temps pour ne pas qu’ils se sentent exclus. Mais expliquez-leur que ces compotes sont en réalité des friandises qui doivent rester exceptionnelles et proposez-leur plutôt un fruit frais (ou un légume, encore mieux!) et une poignée d’oléagineux. Allez faire les courses sans eux et n’en achetez que très rarement. Être parent et bienveillant n’oblige pas à accéder à toutes les demandes de nos enfants si nous considérons que celles-ci ne correspondent pas à nos valeurs ou sont délétères pour leur santé, leur sécurité ou leur bien-être. Nous sommes les adultes responsables, à nous de faire les bons choix et de les assumer.
Et sinon, si vous avez la chance que vos enfants ne soient pas demandeurs, ne commencez pas à leur en proposer ! Il vaut toujours mieux prévenir que guérir.
Sophie Papszt - Familles-naturos
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